On a l’accent et on aime ça!

« L’accent toulousain, c’est la musique d’une langue dont on aurait oublié les paroles ». Cette phrase un brin poétique de Pierre Escudé, maître de conférences bilinguisme Français-Occitan à l’Université du Mirail, retranscrit bien ce qu’est l’essence même de l’accent : ce qui reste en l’absence des mots. « Débattre sur l’accent, c’est obligatoirement parler de l’humain. Toutes les langues ont leur accent. A Toulouse, Nougaro est son poète », remarque une intervenante, lors d’un Café Savoir sur la question. Selon Pierre Escudé, le débat est vaste : « Soit on laisse son accent sur le bord du trottoir et la loi du plus fort le tue, soit on garde le contact pour apprendre à vivre avec. L’accent toulousain est notre marque de fabrique qui accentue la richesse linguistique et qui démontre que nous appartenons à la fois à la France et à l’Occitanie ».

Alice, 21 ans, est étudiante en linguistique. « Le thème est accrocheur. Je ne suis pas originaire du Sud-Ouest et on le devine rapidement. L’accent marque d’emblée son origine. Les gens font la différence :  » Toi, tu n’es pas d’ici », me dit-on souvent ».

L’accent, c’est nous

Grave, pointu, aigu, chantant, chuintant, l’accent c’est un second nous : « On est entendu et vu par notre accent, reprend Pierre Escudé. A Paris, quand je demande une chocolatine, tout le monde sait d’où je viens. Vous apportez le soleil, me dit-on ».

L’accent est aussi une donnée politique : « Ainsi, sous la Révolution on considère que la diversité des langues régionales est un obstacle à la propagande révolutionnaire, poursuit Pierre Escudé. Les lois sur l’enseignement de Jules Ferry vont accentuer ce phénomène ». Pourtant si la langue française unit, l’accent singularise. Il est le point qui fait revenir à notre histoire, nos racines et nos traditions. Comment alors gérer cet accent ? « Dans le métro, l’appellation des stations en occitan suscite bien des réactions. Souvent elle fait réagir les anciens qui se surprennent d’un coup à discourir en occitan. Quant aux jeunes, ils découvrent que sous le français, se cache une autre langue ». Il faut donc accepter cet accent sans dualité. « Je fais partie d’une génération qui a été complexée par son accent. Quand je quittais Toulouse, c’était un fardeau. Je me sentais différent. Presque inférieur, avoue un senior. Aujourd’hui, je suis fier de ce particularisme ».